Rupture Conventionnelle

rupture conventionnelle

Une approche consensuelle

Depuis 2008, un nouveau mode de rupture est apparu dans la pratique : la rupture conventionnelle.

Contrairement aux modes de rupture classiques à l’initiative d’une seule partie, cette rupture se concrétise d’un commun accord entre l’employeur et le salarié comme l’expose l’article L. 1237-11 du code du travail.

Dès sa mise en place, la Cour de cassation a estimé que sauf dispositions légales contraires, la rupture du contrat de travail par accord des parties ne peut intervenir que par l’intermédiaire d’une rupture conventionnelle (Cass. soc., 15 octobre 2014, n° 11-22.251).

Ce mode de rupture spécifique se caractérise par une procédure strictement encadrée par le code du travail mais n’est pas sans limite posée par la jurisprudence.

Vous trouverez ci-après une foire aux questions concernant ce mode de rupture du contrat de travail. 

Peut-on se faire assister lors des entretiens d'une procédure de rupture conventionnelle ?

L’article L. 1237-12 du code du travail énonce que la rupture conventionnelle se décide lors d’un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister :

  • Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise,
  • Soit, en l’absence d’institution représentative du personnel dans l’entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative.


L’employeur peut se faire assister quand le salarié en fait lui-même usage, les deux parties s’en informant réciproquement. Pour l’employeur, il peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou, dans les entreprises de moins de 50 salariés, par une personne appartenant à son organisation syndicale d’employeurs ou par un autre employeur relevant de la même branche.

La jurisprudence estime que le défaut d’information du salarié par l’employeur des possibilités d’assistance lors de l’entretien n’entraîne pas la nullité de la Convention de rupture. Aussi, le salarié peut se faire assister par son supérieur hiérarchique (Cass. soc., 29 janvier 2014, n° 12-27.594).

L’importance de cet ou ces entretiens est capitale puisqu’en son absence, la rupture conventionnelle est nulle. Il appartient, cependant, à la partie qui invoque cette carence d’en établir l’existence, ce qui est très difficile en pratique si la Convention de rupture mentionne une date d’entretien (Cass. soc., 1er décembre 2016, n° 15-21.609).

Dispose-t-on d'un droit de rétractation ?

Une fois l’entretien déroulé et la convention de rupture signée par les parties, selon l’article L. 1237-13 du code précité, chacune d’entre elles dispose d’un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie.

Sur ce point, la jurisprudence a précisé que le droit de rétractation est valablement exercé dès lors que la lettre de rétractation est adressée à l’autre partie dans le délai de 15 jours calendaires, peu important sa date de réception (Cass. soc., 14 février 2018, n° 17-10.035).

Comment se finalise la procédure ?

A l’issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d’homologation à l’inspection du travail (la DREETS) avec un exemplaire de la convention de rupture.

La DREETS dispose d’un délai d’instruction de quinze jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour s’assurer du respect des conditions légales et de la liberté de consentement des parties.

A défaut de notification dans ce délai, l’homologation est réputée acquise de manière tacite.

Quelle somme le salarié peut-il percevoir lors d'une rupture conventionnelle ?

En cas de rupture conventionnelle, le salarié perçoit une indemnité de rupture équivalente dans son montant à l’indemnité légale de licenciement ou l’indemnité conventionnelle si celle-ci est plus favorable. 

Dans l’hypothèse où l’indemnité convenue dans la convention de rupture est inférieure au montant légal, la rupture conventionnelle n’est pas, pour autant, nulle (Cass. soc., 4 novembre 2015, n° 13-27.873).

La remise d'un exemplaire de la rupture conventionnelle est-elle obligatoire ?

La remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié est une formalité substantielle et exigée sous peine de nullité. En pratique, il est donc préconisé à l’employeur de mentionner sur les exemplaires signés qu’une remise a été faite au salarié ou de faire signer une décharge au salarié sur cette remise (Cass. soc., 23 septembre 2020, n° 18-25.770). 

La rupture conventionnelle est-elle possible pour un salarié protégé ?

Pour les salariés protégés, la rupture conventionnelle reste possible mais la procédure est aménagée compte tenu de leur statut protecteur. Ainsi, selon l’article L. 1237-15 du code du travail, l’employeur est obligé de solliciter l’autorisation de l’inspecteur du travail avant toute rupture.

Dans le cadre de ce contrôle, l’inspection du travail vérifie notamment que la rupture conventionnelle n’a été imposée à aucune des parties et que la procédure et les garanties précitées ont été respectées (CE, 13 avril 2023, n° 459213).

Cette autorisation est indispensable, à défaut de quoi, la rupture conventionnelle est nulle, même si elle a fait l’objet d’une simple homologation (Cass. soc., 04 novembre 2020, n° 19-11.865).

La rupture conventionnelle se distingue-t-elle de la démission et quels sont ces avantages ?

A travers cette procédure, on aura donc compris que la rupture conventionnelle se distingue nettement de la démission qui est à l’initiative seule du salarié. 

De cette initiative où le salarié perdra tout droit au chômage, la rupture conventionnelle a l’avantage majeur, côté salarié, d’être considéré aux yeux de Pôle emploi comme une rupture ouvrant droit aux indemnités versés par cet organisme.

Côté employeur, la rupture conventionnelle permet aux deux parties de se quitter en bon terme et surtout, d’éviter tout aléa qui peut exister derrière une procédure de licenciement. De plus, hormis hypothèse d’un consentement vicié, le salarié ne pourra pas contester le motif même de la rupture, celui-ci étant par nature objectif.

La rupture conventionnelle est-elle un accord entre un employeur et un salarié ?

Comme exposé plus haut, toute rupture conventionnelle doit nécessiter un consentement libre et éclairé du salarié à sa signature, à défaut de quoi, la rupture est nulle.

Celle-ci étant la réunion de deux volontés s’accordant sur le principe du contrat de travail, aucune des parties ne peut forcer l’autre à signer. Aussi, une prise d’acte d’un salarié ne saurait être justifiée par un simple refus de l’employeur de ne pas consentir à une rupture conventionnelle (Cass. soc., 19 mai 2021, n° 19-20.526).

L'existence d'un conflit empêche-t-il la conclusion d'une rupture conventionnelle ?

Les hypothèses de vice du consentement sont rarement retenues par la jurisprudence. A titre d’illustration, l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la rupture conventionnelle (Cass. soc., 19 novembre 2014, n° 13-21.979).

De même, l’existence de faits de harcèlement moral n’affecte pas en elle-même la validité de la rupture conventionnelle (Cass. soc., 23 janvier 2019, n° 17-21.550).

Il appartiendra ainsi de démontrer au salarié que les faits de harcèlement moral étaient tellement impactant pour sa santé que sa seule solution était de quitter l’entreprise en signant la rupture conventionnelle.

Aussi, dans la situation où l’employeur avait fait pression sur la salariée dont la compétence n’avait auparavant jamais été mise en cause en lui délivrant deux avertissements successifs et injustifiés, qu’il l’avait dévalorisée et avait dégradé ses conditions de travail, ce qui avait eu des conséquences sur son état de santé, et qu’il l’avait incitée, par les pressions ainsi exercées, à accepter la voie de la rupture conventionnelle, le vice du consentement est caractérisé, de sorte que la rupture conventionnelle est déclarée nulle (Cass. soc., 8 juillet 2020, n° 19-15.441).

Plus récemment, la Cour de cassation a confirmé la nullité d’une rupture conventionnelle dans l’hypothèse où la salariée subissait des faits de harcèlement sexuel, de sorte qu’elle se trouvait dans une situation devenue insupportable et dont les effets pouvaient encore s’aggraver si elle se poursuivait, n’avait eu d’autre choix que d’accepter la rupture et n’avait pu donner un consentement libre et éclairé (Cass. soc., 4 novembre 2021, n° 20-16.550).

La rupture conventionnelle est-elle possible pendant un arrêt au titre d'un accident du travail ?

La conclusion d’une rupture conventionnelle est possible y compris au cours de la période de suspension consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle (Cass. soc., 30 septembre 2014, n° 13-16.297).

Si vous souhaitez plus de précision sur le régime juridique de la visite de reprise, vous pouvez utilement consulter une FAQ spécifique sur cette thématique.

Quel est le régime fiscal et social de l'indemnité de rupture conventionnelle ?

D’un point de vue fiscal, selon l’article 80 duodecies 6° du code général des impôts, lorsque le salarié n’a pas atteint l’âge de la retraite, l’indemnité de rupture conventionnelle est exonérée à hauteur du plus élevé des trois montants suivants :

  • soit le double de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture du contrat de travail,
  • soit la moitié du montant total des indemnités versées (hors éléments de salaire), si ce seuil est supérieur,
  • soit le montant de l’indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l’accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi.


D’un point de vue social, selon l’article articles L. 242-1 7° du code de la sécurité sociale, l’indemnité de rupture conventionnelle est exonérée de cotisations sur la part non imposable et dans la limite d’un montant maximal de deux PASS. L’indemnité est intégralement soumise à cotisations lorsque son montant est supérieur à dix fois le PASS.

S’agissant de la CSG et CRDS, l’indemnité de rupture conventionnelle est exonérée dans la limite du moins élevé des deux montants suivants (Article L. 136-1-1 III 5° du CSS) :

  • Le montant de l’indemnité conventionnelle ou légale de licenciement.
  • Le montant exclu de l’assiette des cotisations de sécurité sociale, qui est au maximum de 2 PASS.


Enfin, depuis septembre 2023, l’indemnité de rupture conventionnelle est assujettie à une contribution patronale dont le taux est fixé à 30 %, sur la partie exclue de l’assiette de cotisations sociales et non plus au forfait social (Articles L. 137-12 et L. 137-15 du CSS).

Quel est le rôle de l'avocat dans le cadre d'une rupture conventionnelle ?

L’acompagnement par un Cabinet d’avocat permet de  sécuriser, dans les meilleures conditions, le respect de la procédure de rupture conventionnelle et ainsi éviter tout refus d’homologation de l’administration.

En outre l’avocat peut accompagner à toutes les étapes de la procédure, autant un employeur qu’un salarié, pour optimiser, au mieux, les conditions de départ.

Pour toute problématique en lien avec la conclusion d’une rupture conventionnelle, le Cabinet reste à votre disposition.

Florent LABRUGERE

Avocat en droit du travail et en droit de la sécurité sociale

N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d’information. En raison de l’évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.