Congés payés et décompte des heures supplémentaires

CA PARIS, 20 février 2025, RG n° 22/04840 *

Par cet arrêt, la Cour d’appel de PARIS est amenée à préciser les règles de décompte des heures supplémentaires et l’application du droit de l’Union européenne en la matière.

Plus précisément, selon l’article L. 3121-28 du code du travail, « toute heure accomplie au delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent ».

Selon l’article suivant, et hors mécanisme d’aménagement du temps de travail, les heures supplémentaires se décomptent par semaine.

En pratique, il arrive que sur une semaine donnée un salarié soit absent une journée pour cause de congés payés.

Quid alors du décompte des heures supplémentaires et, plus particulièrement, faut-il adapter le seuil des 35 heures hebdomadaire ?

Jusqu’à présent, la Cour de cassation a jugé que les jours de CP ne peuvent être pris en compte, à défaut de dispositions légales ou conventionnelles ou d’un usage contraires, pour la détermination des heures supplémentaires (Cass. soc., 04 avril 2012, n° 10-10.701).

En revanche, sur le fondement du droit européen, la position de la Cour de justice de l’Union européenne est inverse.

Elle considère, en effet, que le droit de l’UE s’oppose à une disposition d’une convention collective en vertu de laquelle, afin de déterminer si le seuil des heures travaillées donnant droit à majoration pour heures supplémentaires est atteint, les heures correspondant à la période de congé annuel payé pris par le travailleur ne sont pas prises en compte en tant qu’heures de travail accomplies (CJUE, 13 janvier 2022, DS c/ Koch Personaldienstleistungen GmbH, C-514/20).

Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.

Au cas d’espèce, il était question d’un salarié qui a été engagé, le 03 août 2015, en qualité de chauffeur poids lourds. Le 29 mars 2017, il a fait l’objet d’un licenciement pour faute grave.

Ultérieurement, il a saisi les juridictions prud’homales aux fins notamment de réclamer le paiement d’heures supplémentaires.

Dans le cadre de l’instance judiciaire, il a produit des décomptes de son temps de travail en comptabilisant huit heures de travail au titre des congés payés ou des jours fériés pour calculer le nombre d’heures supplémentaires hebdomadaires.

Après avoir rappelé les dispositions du droit de l’Union ainsi que la jurisprudence précitée, la Cour d’appel de PARIS énonce que dans un litige opposant un bénéficiaire du droit à congé à un employeur ayant la qualité de particulier, il incombe au juge national d’assurer, dans le cadre de ses compétences, la protection juridique découlant de l’article 31, paragraphe 2, de la Charte et de garantir le plein effet de celui-ci en laissant au besoin inappliquée ladite réglementation nationale.

Aussi, elle écarte les dispositions du droit français et juge que les jours de congés payés pris au cours d’une période hebdomadaire doivent être pris en considération pour déterminer si le seuil des heures travaillées donnant droit à majoration pour heures supplémentaires est atteint.

En revanche, pour elle, la protection juridique découlant de l’article 31, paragraphe 2, de la Charte ne conduit pas à prendre en compte les jours fériés.

Au regard des éléments produits, et avec la prise en compte des congés payés, elle en conclut que le salarié est dans son bon droit de réclamer des heures supplémentaires.

Cet arrêt fait écho à la décision récente de la Cour de cassation qui a opéré à un revirement de jurisprudence (Cass. soc., 10 septembre 2025, n° 23-14.455).

Ainsi, au-delà des normes françaises, il convient également de vérifier le droit de l’Union européenne.

Il conviendra maintenant de voir si les jours fériés doivent également être exclus ou non du décompte comme le juge la Cour d’appel de PARIS.

Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique en droit du travail et droit de la sécurité sociale.

Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

Droit du travail – Droit de la sécurité sociale

***

N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

florent labrugere avocat droit du travail lyon

Maître Florent Labrugère

Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !