L’accident du travail survenu en séminaire

CA LYON, 06 mai 2025, RG n° 22/01386 *

Par cet arrêt, la Cour d’appel de LYON est amenée à statuer sur l’existence d’une faute inexcusable d’un employeur concernant un accident du travail survenu lors d’un séminaire.

En la matière, on rappellera que selon l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, « lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants ».

Cette indemnisation complémentaire consistera notamment en la majoration de la rente en cas de taux d’incapacité et de la réparation des préjudices non indemnisés par la CPAM.

Aucune définition n’est donnée par la loi de la faute inexcusable.

Il est maintenant acquis en jurisprudence que le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque (Cass. civ. 2ème, 08 octobre 2020, n° 18-25.021) :

1/ Il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur,

2/ Il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Il appartient au salarié de rapporter la réunion de ces deux conditions (Cass. civ. 2ème, 22 septembre 2022, n° 21-13.494).

Par ailleurs, la Cour de cassation a précisé que l’employeur ne peut s’affranchir de son obligation de sécurité par la conclusion d’un contrat prévoyant qu’un tiers assurera cette sécurité (Cass. civ. 2ème, 16 novembre 2023, n° 21-20.740).

Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.

Au cas d’espèce, il était question d’une salariée qui a été victime, le 26 janvier 2017, d’un accident alors qu’elle participait à une activité course de luges lors d’un séminaire organisé par son employeur.

Cet accident a été pris en charge par la CPAM au titre de la législation professionnelle.

Ultérieurement, la salariée a saisi les juridictions de sécurité sociale aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Après avoir rappelé les règles précitées, la Cour d’appel de LYON énonce que « la conscience du danger exigée de l’employeur est analysée in abstracto et ne vise pas une connaissance effective et précise de celui-ci. En d’autres termes, il suffit de constater que l’employeur ne pouvait ignorer celui-ci ou ne pouvait pas ne pas en avoir conscience ou encore qu’il aurait dû en avoir conscience. Cette conscience s’apprécie au moment ou pendant la période de l’exposition au risque ».

En premier lieu, elle indique qu’il n’appartenait pas à la salariée d’appeler en cause le prestataire de services ayant organisé l’activité à l’origine de l’accident.

En effet, l’accident de luges s’est produit lors d’un séminaire organisé par l’employeur au temps et au lieu du travail. Le caractère facultatif ou non de l’activité à l’origine de l’accident du travail est sans emport.

Ainsi, l’activité s’est produite dans un lieu choisi par l’employeur qui conservait un pouvoir de direction et de surveillance, a eu lieu avec l’assentiment de ce dernier et à sa demande.

Or, la Cour relève que l’employeur explique s’en être remis à l’organisation interne de l’établissement d’accueil et n’avoir pas eu la maîtrise de l’organisation.

Ce faisant, il admet n’avoir pas vérifié la sécurité de l’activité litigieuse proposée à ses salariés dans le cadre du séminaire organisé par ses soins.

Selon la Cour, l’employeur fait ainsi l’aveu de l’absence de mesures prises pour assurer la sécurité de la salariée alors qu’il ne pouvait ignorer que l’activité en question présentait par définition un caractère intrinsèquement dangereux, s’agissant d’une course de luges la nuit, sur une piste de ski gelée, sans aucun éclairage, ni sans protection particulière (pas d’équipement de protection individuelle).

Il aurait dû évaluer les risques en amont et, le cas échéant, intervenir soit pour interdire l’activité, soit pour donner des consignes de sécurité dont il pouvait s’enquérir auprès du prestataire afin d’assurer la sécurité de sa salariée.

Ainsi, la Cour d’appel retient l’existence d’une faute inexcusable et ordonne une expertise afin d’évaluer les préjudices de la salariée.

Cet arrêt vient illustrer le maintien de l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur en toute circonstance.

Côté employeur, il convient d’assurer le respect de cette obligation légale, y compris lors d’une activité ludique organisée par ses soins.

Côté salarié, cela permet de potentiellement rechercher la responsabilité de son employeur pour tout accident survenu au temps et au lieu du travail.

Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique en droit du travail et droit de la sécurité sociale.

Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

Droit du travail – Droit de la sécurité sociale

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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

florent labrugere avocat droit du travail lyon

Maître Florent Labrugère

Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !