CA TOULOUSE, 17 janvier 2025, RG n° 23/01668 *
Par cet arrêt, la Cour d’appel de TOULOUSE revient sur le délai de prescription applicable en matière disciplinaire.
En la matière, le texte de référence est l’article L. 1332-4 du code du travail.
Celui-ci dispose qu’aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales.
Dans l’exception de poursuites pénales, la Cour de cassation a précisé que l’ouverture d’une enquête préliminaire, qui n’a pas pour effet de mettre en mouvement l’action publique, n’est pas un acte interruptif (Cass. soc., 13 octobre 2016, n° 15-14.006).
Seules l’ouverture d’une information sur réquisitoire du ministère public, une plainte avec constitution de partie civile ou une citation directe de la victime ont pour effet d’interrompre la prescription (CE, 05 décembre 2011, n° 328380).
De plus, le délai de deux mois pour engager les poursuites disciplinaires est interrompu par la mise en mouvement de l’action publique jusqu’à la décision définitive de la juridiction pénale (Cass. soc., 06 décembre 2000, n° 98-45.772).
Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.
Au cas d’espèce, il était question d’un salarié qui a été engagé, le 24 août 2016, en qualité de serveur. Suite à la découverte de faux billets utilisés pour le règlement d’additions, une procédure pénale a été initiée en octobre 2016.
Le 20 novembre 2020, le Tribunal correctionnel a déclaré coupables des chefs de mise en circulation et détention de fausse monnaie, quatre clients de l’employeur.
En parallèle, le salarié a été convoqué à deux entretiens préalables les 19 octobre 2020 et 05 janvier 2021.
Finalement, le salarié a été licencié le 12 janvier 2021 pour faute grave en raison de l’encaissement de faux billets sans contrôle préalable de leur validité. Ultérieurement, il a saisi les juridictions prud’homales pour contester son licenciement.
Au cas présent, le salarié soutient que les faits fautifs invoqués par l’employeur pour fonder les poursuites disciplinaires sont prescrits dès lors que celui-ci en a eu connaissance dès le 30 septembre 2020, jour du dépôt de sa plainte.
Après avoir rappelé les règles précitées, la Cour d’appel de TOULOUSE relève que la procédure disciplinaire a bien été engagée dans le délai de deux mois à compter de la connaissance par l’employeur des faits reprochés au salarié puisque c’est le 30 septembre 2020 que le salarié a été convoqué à l’entretien préalable.
À cette date, il n’existait pas de poursuites pénales ayant un effet interruptif puisque seule une plainte simple avait été déposée.
Toutefois, dès le 16 octobre 2020, les faits, au plan pénal, ont fait l’objet de poursuites lors du défèrement des intéressés.
Pour la Cour, c’est cette date qui a marqué l’interruption de la prescription. Celle-ci n’a repris son cours qu’à compter du caractère définitif de la décision de condamnation, soit le 30 novembre 2020.
Or, dès cette date, qui marquait la connaissance complète par l’employeur des faits, et en particulier de la matérialité de la fausse monnaie, l’employeur a repris la procédure disciplinaire dans l’état où elle se trouvait par une nouvelle convocation à entretien préalable le 15 décembre 2020, c’est à dire sans que le délai de prescription soit acquis.
Elle écarte donc la prescription invoquée par le salarié. Sur le fond, elle requalifie la faute grave en faute simple au regard des circonstances de la cause.
Cet arrêt vient mettre en lumière une exception rare à l’interruption du délai de prescription de deux mois en matière disciplinaire.
En tout état de cause, il est primordial de respecter ledit délai sous peine de voir juger le licenciement comme non fondé sans même s’intéresser à la réalité des fautes reprochées au salarié.
Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique en droit du travail et droit de la sécurité sociale.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
Droit du travail – Droit de la sécurité sociale
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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

Maître Florent Labrugère
Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !