Le remboursement anticipé d’un indu réclamé à un professionnel de santé
Selon l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, en cas d’inobservation des règles de tarification ou de facturation, la CPAM peut initier à l’encontre d’un professionnel de santé une procédure d’indu.
Le même article précise que l’action en recouvrement s’ouvre par l’envoi au professionnel d’une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations.
Si le professionnel de santé n’a ni payé le montant réclamé, ni produit d’observations et en l’absence de contestation, la CPAM peut récupérer ce montant par retenue sur les versements de toute nature à venir.
L’article R. 133-9-1 du même code énonce que la notification d’indu doit préciser la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement.
Elle mentionne l’existence d’un délai de deux mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s’acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours, notamment par la saisine de la Commission de recours amiable.
A défaut de paiement dans le délai imparti et en l’absence de contestation, le directeur de l’organisme de sécurité sociale compétent adresse au professionnel de santé une mise en demeure.
Il ressort ainsi de la lecture de ces textes qu’en cas de contestation du professionnel de santé, aucun remboursement anticipé ne peut être opéré par la CPAM jusqu’au rendu d’une décision définitive de la Commission de recours amiable ou des juridictions de sécurité sociale si elles ont été saisies.
La Cour de cassation a d’ailleurs jugé que « l’organisme d’assurance maladie ne peut engager la procédure de recouvrement de l’indu précédemment notifié au professionnel ou à l’établissement de santé qu’après avoir adressé à ce dernier la mise en demeure qu’il prévoit » (Cass. civ. 2ème, 09 mars 2017, n° 16-12.209).
Dans deux arrêts récents, deux Cour d’appel ont également statué en ce sens.
En premier lieu, il était question d’une infirmière libérale qui a fait l’objet d’un contrôle de son activité par la CPAM sur la période du 01er septembre 2016 au 31 mars 2019. Ce contrôle a révélé des anomalies de facturation.
Par courrier en date du 05 septembre 2019, la CPAM lui a donc notifié un indu pour un montant de 6.341,40 €.
La professionnelle de santé a contesté cet indu devant les juridictions de sécurité sociale. A l’appui de sa contestation, elle mettait notamment en avant les retenues illicites opérées par la CPAM en vue de rembourser l’indu et ce, en dépit de ladite contestation.
Sur ce point, la Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE relève qu’à la suite de la notification d’indu par la caisse d’un indu, l’intéressée l’a contesté en saisissant la Commission de recours amiable par courrier recommandé du 4 novembre 2019 puis le Tribunal judiciaire – Pôle social par courrier du 29 janvier 2020.
Or, la CPAM a procédé les 20 septembre, 30 septembre, 4 octobre et 27 octobre 2021 à des retenues sur les sommes dues à l’intéressée pour un montant de 6 341,40 euros, montant que la caisse lui a remboursé ultérieurement.
Pour autant, celle-ci n’a pas délivré de mise en demeure préalablement aux retenues effectuées sur les flux financiers.
Pour la Cour, si l’absence d’émission d’une mise en demeure importe peu quant à l’appréciation par le juge, saisi d’une contestation de l’indu, du bien-fondé de celui-ci, en revanche, les dispositions de l’article L. 133-4 du code de sécurité sociale interdisent à l’organisme de sécurité sociale de procéder au recouvrement des sommes afférentes sans qu’il ne soit préalablement adressé de mise en demeure, ce que la caisse a réalisé.
Ainsi, au cas présent, la caisse ayant procédé, indépendamment de la contestation engagée par l’infirmière, au recouvrement de l’indu sans avoir adressé, au préalable, une mise en demeure à celle-ci à la suite de la notification de l’indu, la procédure de recouvrement est entachée d’irrégularité et doit être annulée.
La circonstance d’un remboursement opéré par la caisse est également inopérant dès lors que cette dernière s’est affranchie de règles dont le respect a pour objet de garantir les droits des professionnels concernés.
La Cour d’appel déboute donc la Caisse de sa demande en paiement de l’indu (CA AIX-EN-PROVENCE, 19 septembre 2025, RG n° 23/11338).
Dans des circonstances similaires, la Cour d’appel de MONTPELLIER a également statué en ce sens (CA MONTPELLIER, 04 juillet 2025, RG n° 21/01960).
Le Cabinet reste à disposition pour accompagner et assister les professionnels de santé dans leur relation avec la CPAM.
Florent LABRUGERE
Avocat en droit du travail et en droit de la sécurité sociale
N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d’information. En raison de l’évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.

Maître Florent Labrugère
Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !