Les garanties conventionnelles dans le cadre d’une procédure de licenciement
Le droit du travail a la particularité de disposer de plusieurs sources normatives, dont la loi et les Conventions collectives.
Les dernières grandes réformes du code du travail ont eu pour finalité de laisser une place non négligeable aux sources conventionnelles en prévoyant le triptyque suivant :
1°/ Des règles d’ordre public,
2°/ Des règles issues des Conventions collectives,
3°/ Des dispositions supplétives.
A titre d’illustration, pour les contreparties dues au titre des heures supplémentaires, l’article L. 3121-28, compris dans une sous-section relative à l’ordre public, prévoit que ces heures donnent lieu à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.
La sous-section suivante, relative au champ de la négociation collective, comprend l’article L.3121-33 qui renvoie aux dispositions conventionnelles par rapport au taux de la majoration des heures supplémentaires.
Ainsi, pour chaque domaine du droit du travail, il convient de bien combiner les règles légales et conventionnelles, comme en matière de procédure de licenciement.
A cet effet, les articles L. 1232-1 et suivants du code du travail prévoit l’encadrement de cette procédure par l’organisation, par exemple, d’un entretien préalable.
La Convention collective applicable à une situation donnée peut venir compléter ces règles et offrir notamment des garanties supplémentaires aux salariés.
Celles-ci peuvent être de différentes nature. A titre d’illustration, la Convention collective nationale des entreprises d’architecture du 27 février 2003 prévoit que la lettre de licenciement doit être notifiée dans un délai de 10 jours francs maximum après l’entretien préalable (Article IV. 2.1).
La jurisprudence estime que l’inobservation de ce délai, qui constitue une garantie de fond, prive le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 27 mars 2013, n° 11-20.737).
Il peut également être prévu qu’un licenciement ne peut intervenir qu’après avis d’une Commission spécifique.
Ces garanties supplémentaires peuvent également résulter d’une disposition d’un règlement intérieur d’une entreprise (Cass. soc., 13 septembre 2023, n° 21-25.830 : ici, le règlement intérieur prévoyait que la lettre de convocation à entretien préalable devait informer le salarié des griefs retenus contre lui).
En revanche, il convient de bien délimiter leur champ d’application. Ainsi, si des garanties supplémentaires sont prévues pour une procédure de licenciement disciplinaire, elles n’ont pas vocation à s’appliquer à un licenciement pour insuffisance professionnelle (Cass. soc., 22 juin 2011, n° 09-42.697).
Se pose également la question de la sanction en cas de non-respect de l’employeur de ces garanties supplémentaires.
Sur ce point, la législation a évolué par rapport à la sanction en cas de non-respect d’une consultation préalable conventionnelle.
Depuis 2017, l’article L. 1235-2 du code du travail dispose que le non-respect de cette formalité est sanctionné par l’accord d’une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
Pour les autres garanties, le code du travail ne donne pas particulièrement de précision.
Généralement, la jurisprudence estime que « l’irrégularité commise dans le déroulement de la procédure disciplinaire, prévue par une disposition conventionnelle ou un règlement intérieur, est assimilée à la violation d’une garantie de fond lorsqu’elle a privé le salarié de droits de sa défense ou lorsqu’elle est susceptible d’avoir exercé en l’espèce une influence sur la décision finale de l’employeur » (Cass. soc., 20 mars 2024, n° 22-17.292).
Tel peut être le cas, par exemple, d’une Convention collective qui prévoit une information préalable des représentants du personnel avant la notification du licenciement (Cass. soc., 17 mars 2015, n° 13-24.252).
En revanche, l’obligation pour l’employeur d’adresser pour information copie de la notification de sa décision à une commission paritaire, laquelle a uniquement pour mission de donner un avis et concilier les parties après la notification du licenciement, et non de se prononcer sur le principe de cette mesure, ne constitue pas une garantie de fond (Cass. soc., 23 octobre 2024, n° 22-19.319).
Dans un arrêt récent, la Cour d’appel de LYON a été amenée à rappeler ces règles (CA LYON, 18 avril 2025, RG n° 22/02885).
Au cas d’espèce, il était question d’une salariée engagée en qualité de Directrice régionale et se voyant appliquer la Convention collective des organismes de formation. Le 14 février 2019, elle a été licenciée pour faute grave.
Contestant ce licenciement, elle a saisi les juridictions prud’homales.
A l’appui de cette question, il était invoqué les dispositions d’un accord d’entreprise prévoyant une procédure spécifique en matière de licenciement pour faute grave, à savoir : « La lettre de convocation à l’entretien préalable fera obligatoirement état de l’intention de licenciement pour faute grave avec la nature des faits reprochés, si possible par écrit. Une copie de la lettre sera adressée aux délégués syndicaux du Cesi afin de permettre à une organisation syndicale choisie par le salarié de l’assister lors de l’entretien préalable, en plus d’un salarié de son choix ».
Or, ici, cette procédure n’a pas été respectée par l’employeur. La Cour d’appel juge que la salariée s’est rendue à l’entretien préalable sans avoir eu connaissance de la nature des faits qui allaient être évoqués, et donc sans avoir pu préparer sa défense utilement.
Elle juge donc que l’employeur a violé une garantie de fond entraînant l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement prononcé.
Le Cabinet reste à disposition pour accompagner et assister salarié et employeur concernant une problématique en lien avec le droit du travail et le droit de la sécurité sociale.
Florent LABRUGERE
Avocat en droit du travail et en droit de la sécurité sociale
N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d’information. En raison de l’évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.

Maître Florent Labrugère
Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !