L’excuse de provocation lors d’une altercation

CA NÎMES, 29 septembre 2025, RG n° 24/01237 *

Par cet arrêt, la Cour d’appel de NÎMES est amenée à apprécier le bien-fondé d’un licenciement pour faute grave d’un salarié qui a notamment tenu des propos insultants à l’égard de son responsable.

De manière classique, l’article L. 1232-1 du code du travail énonce que tout licenciement doit reposer sur une cause réelle et sérieuse.

En matière de faute grave, celle-ci est définie comme celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Il est généralement admis par la jurisprudence que des propos insultants justifient un licenciement pour faute grave (Cass. soc., 08 décembre 2021, n° 20-15.798).

Pour autant, dans certaines circonstances, un tel comportement n’est pas fautif, notamment par le mécanisme de l’excuse de provocation.

Cette notion n’existe pas dans le code du travail mais se dégage de certaines décisions de la chambre sociale.

L’excuse de provocation peut atténuer la gravité d’un acte violent adopté en réaction d’une agression, par exemple, d’un autre collègue (Cass. soc., 30 juin 2010, n° 09-66.213).

Autrement dit, un salarié adopte un comportement fautif par des actes violents ou injurieux mais en réaction d’une agression qu’il a lui-même subi (Cass. soc., 20 octobre 2021, n° 20-10.613).

Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.

Au cas d’espèce, il était question d’un salarié qui a été engagé, le 03 janvier 2018, en qualité d’éducateur spécialisé par une association. Le 04 février 2022, il a fait l’objet d’un licenciement pour faute grave en raison d’une altercation avec son responsable au cours d’une réunion.

La lettre de licenciement fait notamment état des propos suivants : « Je vais t’en mettre un », « connard »…

Contestant cette décision, le salarié a saisi les juridictions prud’homales.

Après avoir retranscrit la lettre de licenciement, la Cour d’appel de NÎMES relève que si le salarié a pu tenir des propos déplacés et inconvenants à l’égard de son supérieur, ce dernier a tenu des propos tout aussi grossiers et injurieux à son encontre, en sorte que ces circonstances ôtent tout caractère de gravité aux faits reprochés.

Par ailleurs, elle note que la réunion a constitué le lieu d’expression d’un mécontentement du personnel confronté à des conditions de travail très difficiles et à un problème récurrent d’effectif, doublé d’un mutisme de la direction, caractérisant une ambiance délétère au sein de l’association.

En outre, pour la Cour, le contexte dans lequel s’est déroulée cette réunion, dont les témoins relatent un état de tension provoqué notamment par l’autoritarisme inopportun du responsable, est de nature à expliquer l’attitude du salarié licencié qui, en d’autres circonstances, aurait justifié un licenciement pour faute grave.

Enfin, la Cour d’appel constate l’absence d’antécédent disciplinaire, de sorte que les griefs évoqués ne peuvent davantage constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Elle juge donc le licenciement comme infondé et accorde au salarié des indemnités à ce titre.

Cet arrêt met en lumière que des propos insultants constituent, en principe, un acte fautif susceptible d’être sanctionné par un licenciement.

Pour autant, selon les circonstances d’une espèce donnée, des motifs légitimes peuvent expliquer un tel comportement, comme l’excuse de provocation.

Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique en droit du travail et droit de la sécurité sociale.

Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

Droit du travail – Droit de la sécurité sociale

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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

florent labrugere avocat droit du travail lyon

Maître Florent Labrugère

Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !