L’existence d’un droit acquis aux heures supplémentaires ?

En droit du travail français, sauf situation particulière, tout salarié est soumis aux trente-cinq heures par semaine conformément à l’article L. 3121-27 du code du travail.

Toute heure accomplie au-dessus de ce seuil est considéré comme une heure supplémentaire conformément à l’article suivant.

Se pose la question si l’employeur peut subitement supprimer la réalisation d’heures supplémentaires régulièrement effectuées par un salarié ?

Sur ce point, le code du travail est silencieux.

La jurisprudence est venue poser un principe : il n’existe pas de droit acquis à l’exécution d’heures supplémentaires sauf engagement de l’employeur vis à vis du salarié à lui en assurer l’exécution d’un certain nombre (Cass. soc., 13 janvier 2016, n° 14-21.714).

Ainsi, généralement, il convient de se reporter aux stipulations du contrat de travail pour voir si des heures supplémentaires sont d’ores-et-déjà fixées, plus communément appelées heures supplémentaires structurelles.

A défaut, au titre de son pouvoir de direction, l’employeur peut décider unilatéralement de ne plus recourir aux heures supplémentaires alors même que le salarié en effectuait un certain nombres par le passé.

Dans ce dernier cas, l’accord du salarié n’est donc pas nécessaire pour supprimer l’exécution des heures supplémentaires.

Deux arrêts récents montrent l’application de cette règle.

A titre d’illustration, la Cour d’appel d’ORLEANS a jugé qu’un salarié était légitime à réclamer le paiement de ses heures supplémentaires puisqu’il était expressément prévu dans le contrat de travail un horaire hebdomadaire de 39 heures, soit la réalisation de 4 heures supplémentaires par semaine.

Au-delà de la question du paiement des heures supplémentaires, la Cour d’appel a également retenu l’existence d’un travail dissimulé ouvrant droit au salarié à une indemnité forfaitaire de six mois de salaire.

En effet, selon elle, l’employeur ne pouvait ignorer que des heures supplémentaires, prévues au contrat de travail, n’étaient pas rémunérées et étaient dues au salarié, caractérisant le caractère intentionnel du non-paiement desdites heures (CA ORLEANS, 28 janvier 2025, RG n° 23/00653).

Dans une autre situation, un salarié invoquait le fait que son employeur a commencé à diminuer fortement le volume de ses heures supplémentaires, jusqu’à leur quasi-suppression, ce qui a immédiatement et très fortement impacté son niveau de rémunération.

Il formulait, à ce titre, une demande de dommages et intérêts à hauteur de 10.000 € en réparation du préjudice subi du fait d’une sanction pécuniaire prohibée.

Cependant, la Cour d’appel de PARIS relève que le salarié ne justifie ni de l’existence d’un engagement de l’employeur sur le nombre d’heures supplémentaires, ni d’un abus dans l’exercice de son pouvoir de direction.

Pour elle, la simple baisse du niveau des heures supplémentaires effectuées ne peut aucunement s’analyser comme une sanction pécuniaire prohibée (CA PARIS, 06 février 2025, RG n° 22/03675).

On notera que la Cour d’appel rappelle que si l’employeur peut unilatéralement supprimer le recours aux heures supplémentaires en l’absence d’engagement de sa part, un abus peut, toutefois, être caractérisé.

En cas d’abus, le salarié peut alors réclamer des dommages et intérêts sans pour autant réclamer le paiement d’heures supplémentaires (Cass. soc., 10 octobre 2012, n° 11-10.455).

Le Cabinet reste à disposition pour accompagner et assister salarié et employeur concernant une problématique en lien avec les heures supplémentaires.

Florent LABRUGERE

Avocat en droit du travail et en droit de la sécurité sociale

N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d’information. En raison de l’évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.

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Maître Florent Labrugère

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