Licenciement

licenciement

La rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur est communément appelée un licenciement.

A cet égard, il existe deux grands types de licenciement : l’un pour motif personnel reposant sur la personne du salarié (faute disciplinaire, insuffisance professionnelle…), l’autre pour motif économique reposant sur la situation économique de l’employeur.

Dans le cadre de cet article, les propos seront principalement axés sur le licenciement pour motif personnel (1).

Quel que soit le motif du licenciement pour motif personnel, une procédure doit être scrupuleusement respectée (2).

Si vous souhaitez plus de précision quant au solde de tout compte remis après un licenciement, vous pouvez utilement consulter la FAQ sur cette thématique.


1. Un licenciement pour motif personnel

a/ En la matière, on rappellera que tout licenciement pour motif personnel doit être fondé sur une cause réelle et sérieuse selon l’article L. 1232-1 du code du travail.

Il existe deux grands motifs de licenciement : disciplinaire et non-disciplinaire.

Cette seconde catégorie regroupe notamment l’insuffisance professionnelle qui se définit « comme un manque de compétence du salarié dans l’accomplissement des missions qui lui sont confiées, à raison d’échecs, d’erreurs ou de négligences qui rendent sa prestation de travail insatisfaisante » (CA MONTPELLIER, 8 juin 2011, RG n° 10/04465).

Il peut également s’agir de l’impossibilité d’un salarié de continuer son activité en raison de son état de santé (inaptitude) ou d’une situation administrative (perte du permis de conduire ou d’une habilitation administrative).

En revanche, de longue date, la Cour de cassation a précisé que la mésentente entre collègues ne peut constituer une cause de licenciement que si elle repose objectivement sur des faits imputables au salarié concerné (Cass. soc., 27 novembre 2001, n° 99-45.163).

Tel n’est pas le cas lorsque les juges constante l’existence de versions différentes sur l’origine de la dégradation des relations professionnelles au sein de l’entreprise et a fait profiter la salariée du bénéfice du doute (Cass. soc., 09 novembre 2004, n° 02-42.938).

Au contraire, lorsque le comportement du salarié a entraîné une démotivation du personnel, il existe une cause objective au licenciement qui lui était imputable (Cass. soc., 22 septembre 2010, n° 09-40.415).


b/ S’agissant de la faute disciplinaire, on retrouve en jurisprudence trois types de fautes :

  • La faute simple qui implique que le salarié est en droit de réaliser son préavis et de percevoir une indemnité de licenciement.

  • La faute grave qui s’entend d’une faute d’une particulière gravité ayant pour conséquence d’interdire le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis.

    Aussi, dans cette hypothèse, la mise en œuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits allégués dès lors qu’aucune vérification n’est nécessaire. Tel n’est pas le cas par exemple d’une procédure de licenciement engagée un mois après la connaissance par l’employeur des faits fautifs (Cass. soc., 17 mars 2010, n° 08-45.103).

    Si vous souhaitez plus de précision sur le régime juridique de la mise à pied, vous pouvez utilement consulter une FAQ spécifique sur cette thématique.

  • La faute lourde qui se définit comme « l’intention de nuire à l’employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise » (Cass. soc., 9 juin 2021, n° 19-26.299).

Dans l’hypothèse des deux dernières fautes, la charge de la preuve repose exclusivement sur l’employeur en cas de contentieux prud’homal.

Les fautes susceptibles d’être reprochées à un salarié sont nombreuses comme en témoigne les quelques exemples jurisprudentiels ci-dessous :

  • Bien-fondé d’un licenciement pour faute grave fondé sur le fait d’avoir fumé sur le lieu de travail (Cass. soc., 1er juillet 2008, n° 06-46.421).
  • Est justifié le licenciement pour faute grave d’une hôtesse de caisse qui s’était trouvée en état d’ébriété dans l’enceinte du magasin, qu’elle avait commis sous l’empire de l’alcool plusieurs erreurs de caisse et qu’elle avait déjà fait l’objet de sanctions disciplinaires dans le passé (Cass. soc., 7 mai 2014, n° 13-10.985).
  • La Cour de cassation a confirmé un arrêt ayant jugé sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour faute grave d’un agent de sécurité. En effet, le seul fait fautif imputable au salarié était de s’être assoupi pendant son service de nuit, de sorte qu’il s’agissait d’un incident isolé de la part d’un salarié qui n’avait fait l’objet d’aucun avertissement ou reproche antérieur (Cass. soc., 22 septembre 2015, n° 14-13.965).
  • Des propos critiques, même vifs, tenus pour un salarié disposant d’une ancienneté de plus de onze ans ne peuvent pas justifier un licenciement pour faute grave (Cass. soc., 17 janvier 2018, n° 16-21.522).
  • Des comportements particulièrement graves, de type propos raciste à l’encontre d’un collègue (Cass. soc., 5 décembre 2018, n° 17-14.594) ou des coups physiques (Cass. soc., 9 juin 2021, n° 20-14.365) constituent nécessairement une faute grave, peu important l’ancienneté du salarié

L’appréciation du caractère réel et sérieux d’une faute disciplinaire reprochée à un salarié s’apprécie au regard des circonstances d’une espèce donnée : ancienneté du salarié, gravité de la faute, éléments de preuve rapportés par chacune des parties…


2. La procédure de licenciement

a/ Avant toute mesure de licenciement, un entretien préalable doit être organisé par l’employeur selon l’article L. 1232-2 du code du travail. La finalité de cette entrevue est de permettre à l’employeur de préciser les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié.

L’article L. 1232-4 du même code précise que lors de son entretien, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise.

Aucune indication n’est donnée quant à la représentation de la personne même de l’employeur et de son éventuel accompagnement par une tierce personne. La jurisprudence est venue apporter des précisions sur ce point.

En premier lieu, comme pour le salarié, l’employeur ne peut se faire représenter que par une personne appartenant au personnel de l’entreprise (Cass. soc., 28 octobre 2009, n° 08-44.241). En pratique, il s’agit d’un salarié occupant un poste à responsabilité ou exerçant des missions d’encadrement.

En second lieu, à l’instar du salarié, le représentant de l’employeur peut être assisté. Là encore, il ne peut se faire assister que par une personne appartenant au personnel de l’entreprise. L’employeur ne peut donc pas être assisté par un avocat (Cass. soc., 22 février 2006, n° 04-43.636) ou un huissier (Cass. soc., 30 mars 2011, n° 09-71.412).

Au surplus, l’assistance de l’employeur ne doit pas transformer l’entretien préalable en enquête ayant pour effet de détourner la procédure de son objet, à savoir donner la possibilité pour le salarié concerné de connaître les griefs allégués par son employeur et de fournir toutes explications utiles.

Ainsi, la présence de multiples personnes présume que l’entretien préalable a été détourné de son objet et rend la procédure de licenciement irrégulière en la forme (Cass. soc., 25 mars 2010, n° 07-43.384).

En revanche, la présence d’un salarié assistant l’employeur qui confirme, en une seule occasion, les propos reprochés au salarié ne rend pas la procédure irrégulière (Cass. soc., 5 mai 2010, n° 09-40.737).


b/ Se pose ces dernières années la question d’un entretien préalable en visio compte tenu de la crise sanitaire survenue depuis 2020.

Une première analyse des textes supposerait que seul l’entretien physique semble possible. Toutefois, il n’est pas posé une interdiction stricto sensu d’un entretien à distance par les dispositions du code du travail. Ainsi, en application de la formule souvent reprise par la Cour de cassation « ajouté à la loi une condition qu’elle ne comporte pas », on pourrait considérer que tout ce qui n’est pas interdit est permis.

De son côté, dans un arrêt rendu en des temps révolus où les nouvelles technologies n’étaient pas développées comme aujourd’hui, la Cour de cassation a considéré qu’une conversation téléphonique ne saurait remplacer l’entretien préalable (Cass. soc., 14 novembre 1991, n° 90-44.195).

Plus récemment, plusieurs juges du fond ont été amenés à se positionner sur le déroulement d’un entretien par le biais des nouveaux moyens de communications (Skype, Zoom, Visioconférence).

La Cour d’appel de VERSAILLES a ainsi admis la validité d’un entretien qui s’est tenu par téléphone. Dans sa décision, la Cour rappelle que l’entretien physique est le principe. Cependant, en période de circonstances exceptionnelles, celui-ci pouvait se dérouler à distance via une téléconférence dès lors que les droits du salarié ont été respectés et que celui-ci a été en mesure de se défendre utilement.

En l’espèce, l’entretien à distance était justifié dans la mesure où la salariée était à l’étranger. En outre, l’entretien avait duré plus d’une heure, de sorte que la salariée a pu connaître les motifs de son licenciement et émettre ses observations (CA VERSAILLES, 4 juin 2020, RG n° 17/04940).

Au contraire, la Cour d’appel de GRENOBLE a jugé qu’un entretien organisé via Skype était illégal dès lors que le code du travail ne prévoit pas expressément ce mode et ne comprend aucune disposition permettant de déroger au principe d’une rencontre physique (CA GRENOBLE, 7 janvier 2020, RG n° 17/02442).

Dans le cadre de licenciement d’un salarié protégé, la Cour administrative d’appel de BORDEAUX a statué dans le même sens dès lors que le salarié n’avait pas donné son accord et que seule la force majeure était susceptible de permettre un entretien via une visioconférence (CAA BORDEAUX, 18 décembre 2017, n° 16BX00818).

On peut donc constater qu’à l’heure d’aujourd’hui, aucune certitude ne peut être donnée quant à la régularité d’un entretien préalable à distance.


c/ A l’issue de l’entretien préalable, si l’employeur décide de licencier le salarié, le premier adresse alors au second une lettre de licenciement qui comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués à l’appui de la rupture du contrat de travail selon l’article L. 1232-6 du code précité.

S’agissant de cette lettre de licenciement, celle-ci doit être signée, à défaut de quoi, la procédure est irrégulière (Cass. soc., 5 janvier 2005, n° 02-47.290). En revanche, une absence de signature ne rend pas la rupture du contrat de travail abusive(Cass. soc., 4 avril 2012, n° 10-28.266).

De plus, la personne signataire de la lettre de licenciement doit disposer du pouvoir de licencier. Tel n’est pas le cas par exemple d’une personne extérieure à l’entreprise comme le cabinet d’expertise comptable (Cass. soc., 26 avril 2017, n° 15-25.204).

La lettre de licenciement peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l’entretien préalable selon l’article susvisé. En cas de licenciement disciplinaire, la lettre de licenciement ne peut être envoyée plus d’un mois après l’entretien préalable selon l’article L. 1332-2 du code du travail. A défaut, le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 27 novembre 2019, n° 18-15.195).

Enfin, dans les quinze jours qui suivent le licenciement, les motifs énoncés dans la lettre peuvent être précisés à l’initiative de l’employeur ou sur demande du salarié. L’employeur a lui-même un délai de quinze jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions s’il le souhaite.

Le Cabinet reste à votre disposition pour toute problématique en lien avec une procédure de licenciement disciplinaire ou non-disciplinaire.

Florent LABRUGERE

Avocat en droit du travail et en droit de la sécurité sociale

N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d’information. En raison de l’évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.